La finance islamique en Tunisie: Une nouvelle perspective aux problèmes de croissance et de pauvreté ou une hypocrisie de plus dans le monde des affaires
Amine BEN GAMRA (*)
La finance islamique est un compartiment de la finance éthique. Elle recouvre l’ensemble des transactions et produits financiers conformes à l’éthique islamique, qui repose sur cinq piliers : l’interdiction de l’intérêt ; l’adossement exclusif à l’économie réelle et tangible ; l’exclusion de certains secteurs d’investissement jugés nocifs pour la vie humaine, tels que le tabac, l’alcool, la pornographie et les jeux d’argent ; la prohibition de la spéculation hasardeuse et de la réalisation d’investissements aléatoires et incertains ; et l’obligation de purification des revenus au moyen de la zakāh.
La finance islamique est un compartiment de la finance éthique. Elle recouvre l’ensemble des transactions et produits financiers conformes à l’éthique islamique, qui repose sur cinq piliers : l’interdiction de l’intérêt ; l’adossement exclusif à l’économie réelle et tangible ; l’exclusion de certains secteurs d’investissement jugés nocifs pour la vie humaine, tels que le tabac, l’alcool, la pornographie et les jeux d’argent ; la prohibition de la spéculation hasardeuse et de la réalisation d’investissements aléatoires et incertains ; et l’obligation de purification des revenus au moyen de la zakāh.
Si l’on prend le premier pilier de l’interdiction de l’intérêt, cette interdiction pose la question de la valeur éthique ou morale du système capitaliste, qui rémunère par l’intérêt bancaire l’oisiveté du capital et permet que le riche soit toujours plus riche, sans avoir à fournir un autre effort que celui d’être riche.
Actuellement en Tunisie,la vocation d’une banque islamique n’est pas d’octroyer à ses clients de prêts à taux 0 % : elle peut néanmoins le faire dans certains cas et pour des montants très limités, sous forme de qardh hassan, mais cela n’entre pas dans le cadre de son activité de base. Comme toute entreprise commerciale, elle conduit ses opérations de sorte à pouvoir couvrir ses charges et dégager un bénéfice. Elle a un bilan comptable à tenir. Elle est par ailleurs soumise à des impératifs règlementaires spécifiques et très stricts, comme la nécessité de respecter des ratios de solvabilité par exemple.
Autrement dit, les banques tunisiennes dites «islamiques» jouent sur la fibre religieuse pour racketter leurs clients à qui elles font payer des intérêts dléguisés (mourabaha).
Lorsque l’on observe l’état de dépravation du monde actuel, asservi par l’emprise de la dette et du système d’esclavagisme financier qui, par la mise en place d’une exploitation excessive de la nature et du vivant, a conduit à la destruction des écosystèmes. La Banque mondiale indiquait récemment dans un rapport qu’en raison de la remontée des taux opérée par les banques centrales, un risque de récession globale pesait sur l’économie mondiale. Ce qui signifie en filigrane des fermetures d’entreprises et des destructions d’emploi, c’est-à-dire de la destruction de valeur. Les taux d’intérêts sont-ils l’unique outil dont les économistes disposent pour lutter contre l’inflation ? A mon sens, c’est un aveu d’échec et de faiblesse ainsi qu’une tentative de préservation d’un système dépassé.
Le système de l’intérêt exonère le financier du risque d’affaire et le place dans une situation de gain, quelle que soit l’issue de l’opération, dans le paradigme islamique, un système financier, s’il veut être légitime, se doit d’être juste. Pour cela, le risque d’affaires entre parties co-contractantes doit être partagé de manière équitable, en plus du risque financier que doit supporter le pourvoyeur de fonds. Cette prise de conscience doit permettre l’actualisation du paradigme dépassé par la conception d’une nouvelle axiologie : cela peut être rendu possible, si et seulement si les États mettent la justice, la générosité, l’altruisme, le partage, la protection de l’environnement et la paix au cœur de leurs politiques économiques, par l’adoption d’un nouvel archétype qui pourrait se réaliser par l’attachement aux principes universels de l’économie islamique, tels que l’abandon de l’usure et de la spéculation, l’attachement aux principes de justice, de compassion, de recherche de bien commun et de responsabilité, le devoir de partage des richesses et de moderation, la mise en œuvre d’un mécanisme de taxation inspiré de la zakāh et d’un instrument de redistribution inspiré du waqf, il serait possible d’offrir une solution à la problématique du financement intégral des objectifs de développement durable à l’échelle planétaire.
Le mécanisme de la zakāh al-māl sur les liquidités permet de taxer le capital. Quant aux recettes générées, elles peuvent être redistribuées et fructifiées grâce à l’instrument du waqf. En effet, par rapport aux modèles de fondation connus, cet instrument, avec ses principes d’irrévocabilité et de perpétuité, apporte une durabilité plus importante et la possibilité de bâtir, de génération en génération, une société de plus juste, généreuse, solidaire et prospère.
Ces remèdes, offerts par les instruments de l’économie et de la finance islamiques, permettraient donc à la fois d’éliminer l’extrême pauvreté et la faim dans le monde. Cela est pleinement conforme à l’objectif de réalisation des finalités (maqāṣid al-sharī’ah), en vue du bien-être humain dont l’économie islamique a fait sa priorité.
* Amine BEN GAMRA
Expert Comptable
Commissaire Aux Comptes
Membre de l'Ordre des Experts Comptable de Tunisie
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