Tunisie: Les plantes aromatiques et médicinales - une filière porteuse
Tap -
(Monia Rihane)
''Amélioration de la qualité et du positionnement des Plantes aromatiques et médicinales" est l'intitulé d'une étude réalisée par l'Agence de promotion des investissements agricoles (APIA) afin d'établir le diagnostic de la filière des plantes aromatiques et médicinales (PAM), "une filière porteuse", selon M.Abdelmoumen Toukabri, administrateur général directeur du partenariat et de la qualité à l'APIA.
''Amélioration de la qualité et du positionnement des Plantes aromatiques et médicinales" est l'intitulé d'une étude réalisée par l'Agence de promotion des investissements agricoles (APIA) afin d'établir le diagnostic de la filière des plantes aromatiques et médicinales (PAM), "une filière porteuse", selon M.Abdelmoumen Toukabri, administrateur général directeur du partenariat et de la qualité à l'APIA.
L'étude effectuée avec le concours d'un bureau tunisien de prestations de services se subdivise en quatre parties: les tendances du marché mondial des PAM, le secteur des PAM en Tunisie, les exportations des produits PAM, le positionnement et orientations stratégiques de la filière.
L'objectif final est de mettre en place un plan d'action visant l'accroissement de la production, l'amélioration de la qualité et le renforcement du positionnement des PAM tunisiennes sur le marché international et ce, à l'état frais, cultivé, sauvage, séché, transformé en eaux florales ou huiles essentielles, a indiqué, à TAP, M.Toukabri. "Cette filière innovante, à forte valeur ajoutée et à même de draîner des capitaux tunisiens et étrangers, demeure sous-exploitée et marginalisée, quoique des efforts considérables visant la promotion du secteur des PAM aient été déployés par l'APIA, quelques opérateurs privés convaincus des opportunités offertes par ce créneau, la recherche scientifique, la direction générale de la forêt et quelques directions techniques du ministère de l'agriculture ainsi que les institutions chargées de l'environnement" a-t-il ajouté. En effet, un maillon très important n'est pas visible sur l'échiquier du développement des PAM, à savoir "le lien entre l'institutionnel et le privé", a-t-il expliqué. La filière PAM se distingue, à ce titre, des autres activités économiques par la diversité des intervenants qui sont constitués des opérateurs économiques (agriculteurs, négociants, herboristes, conditionneurs, transformateurs, laboratoires pharmaceutiques, entreprises dans les parfums et le cosmétique, les exportateurs) et des structures de pilotage et de soutien (administrations centrales, structures d'études et de recherche, de formation, de vulgarisation, d'appui à l'exportation, de normalisation, agences de promotion de l'investissement, organisations professionnelles."D'où l'impératif d'une meilleure coordination entre toutes ces parties prenantes en vue d'une véritable expansion de ce créneau", a souligné M.Toukabri.
Le secteur des PAM en Tunisie
Les PAM contribuent, en moyenne, à hauteur de 0,8% à la formation de la valeur de la production agricole, de 1% à l'effort d'exportation, outre leur contribution à l'emploi et ce, à travers l'offre de 250 000 journées de travail par an, ce qui correspond à 0,9% des journées de travail offert par le secteur agricole.
La superficie totale des PAM cultivées en Tunisie est estimée, en 2011, à 4550 hectares (ha) répartis en plantes médicinales (1396 ha) et plantes aromatiques ou condiments (3154 ha).
La flore des PAM tunisiennes s'élève à 2160 espèces vasculaires, ce qui fait de la Tunisie "un véritable réservoir phytogénétique", eu égard à la nature tant méditerranéenne que saharienne de la Tunisie, selon l'étude. Les superficies des plantes aromatiques ou condiments ont atteint 3154 ha en 2011 après s'être établies à 1274 ha en 2002, soit une hausse de 147%. Les principales cultures pratiquées sont la coriandre, le carvi, le cumin, le fenouil et la corrette avec une prépondérance pour les deux premiers (coriandre, carvi) qui occupent, à eux seuls, 80% de la superficie totale emblavée.
Les PAM biologiques occupaient 750 hectares, en 2007, pour passer, en 2011, à 1000 ha, réalisant un accroissement de 33%.
Le romarin et le myrte constituent les seules espèces spontanées exploitées dans l'entreprise d'une manière organisée pour l'extraction des huiles essentielles. Toutefois, la superficie exploitable de romarin n'est que de 160 000 ha alors que les nappes de romarin sont de l'ordre de 346 000 ha. Cette situation, précise l'étude, est due au manque de main d'oeuvre disponible pour assurer la collecte des plantes et à l'augmentation du prix d'exploitation des nappes proposés par l'administration aux producteurs.
Les exportations tunisiennes de PAM et d'HE
Les PAM tunisiennes sont écoulées sous les formes séchée, fraîche, graines, huiles essentielles (HE) et eaux florales.
Les exportations des produits PAM ont été de l'ordre de 27, MDt en 2011, connaissant, selon l'étude, une évolution significative sur la longue période en raison d'une augmentation des prix et d'une certaine diversification de l'offre.
Les principaux produits exportés sont le néroli, le romarin, l'HE d'orange, autres HE, les eaux de fleurs d'orangers, l'HE de myrte et les eaux de fleurs de rose.
Ces sept produits représentent 97,5% de l'ensemble du groupe.
Les principaux clients de la Tunisie sont la France, l'Espagne, l'Italie, le Royaume uni, l'Allemagne, les Etats unis d'Amérique et les pays maghrébins.
Les PAM tunisiennes sont expédiées essentiellement aux laboratoires, aux fabricants de cosmétiques et à l'agro- industrie ainsi qu'aux maghrébins du sud de la Méditerranée et ceux résidents en Europe, pour ce qui est des condiments, précise l'étude.
Les exportations d'HE, pour lesquelles la Tunisie est classée 32ème au plan mondial, elles sont évaluées à environ 16 MDt, en 2011, et composées principalement de néroli, de romarin, d'HE d'orange, des autres HE, des eaux de fleurs d'orangers, d'HE de myrte et des eaux de fleurs de roses.
Ces exportations ont été réalisées sur la France (67%), l'Espagne (7%) et le Royaume uni (6%).
Le néroli et le romarin sont les deux produits phares des PAM tunisiennes. Ainsi les exportations de néroli se sont élevées, en 2011, à 6,7 MDt en valeur et à 1,6 tonne en volume.
Les principaux pays destinataires sont la France (68%), le Royaume uni (9%), la Suisse (7%) et l'Espagne (6%). Néanmoins, le Néroli tunisien est concurrencé par les nérolis marocain et égyptien "qui présentent des caractéristiques légèrement différentes en raison de la différence des climats", indique l'étude.
Pour ce qui est du romarin, dont la Tunisie est l'un des principaux producteurs, les exportations de ce produit se sont établies, en 2011, à 4MDt pour une quantité de 165 tonnes dirigées vers la France (68%), le Royaume uni (9%), la Suisse (7%) et l'Espagne (6%), outre des exportations limitées vers les USA, l'Allemagne et le Japon (1,5%). "Ces quantités peuvent être augmentées en quantités et en valeur si une certaine synergie se crée entre promoteurs privés au niveau de la base et l'institutionnel, de manière à intégrer la notion de filière à laquelle adhèrent tous les intervenants dans cette chaîne", a affirmé M.Toukabri.
Les exportations des eaux de fleurs d'orangers et de rosiers ont atteint, en 2011, la valeur de 1,4MDt, enregistrant une augmentation continue sur la période 2007-2011, notamment pour les eaux de fleurs d'orangers. Les exportations sont effectuées dans leur quasi-totalité sur la France (97%).
Pour ce qui est des exportations de l'HE de myrte, celles-ci se sont "établies, au cours de la même période, à 478 MDt, représentant 3,5% des exportations de l'ensemble des huiles essentielles.
L'étude signale que la Tunisie, classée 37ème exportateur mondial, connaît une baisse de la valeur des exportations de ces produits et perd ainsi des parts de marché.
Les exportations des plantes et parties de plantes (PpP), composées des graines, pépins et autres parties des plants sont estimées, en 2011, à environ 6,3MDt, et ont connu, d'après l'étude, une nette régression par rapport à 2007, année au cours de laquelle elles se sont élevées à 9,3 MDt.
Des produits complémentaires de PpP non disponibles localement ont été importés pour un montant de 200 mille dinars. Ils proviennent de l'Italie, de l'Allemagne, du Maroc et de la France.
Les échanges de la Tunisie en condiments se caractérisent par une balance structurellement déficitaire.
En 2011, les exportations ont atteint 3,7 MDt un montant en augmentation continue sur la période 2007- 2011.
Les importations se montaient à 5MDt. Les exportations des produits PAM biologiques ont enregistré un accroissement notable en 2009 et 2011.
En valeur, ces exportations sont passées de 1MDt, en 2007, à 5,5MDt, en 2011, réalisant une croissance annuelle moyenne de l'ordre de 100%.
L'objectif global fixé par l'étude est donc d'atteindre, en 2018, des exportations d'un montant de 79,9MDt. Pour ce faire, la stratégie de renforcement du positionnement des produits PAM tunisiens nécessitera des actions axées sur "le développement de la production des PAM", l'organisation et la promotion du secteur PAM en Tunisie" et "la protection de la biodiversité et durabilité du secteur PAM en Tunisie", souligne l'étude. Quant aux importations de PAM, elles ont atteint 7,3 MDt, en 2011, et ont progresssé à un rythme moins rapide que les exportations, d'où une amélioration du taux de couverture des échanges en ces produits. Ces importations se distinguent par la diversité des fournisseurs (France, Espagne, Italie, Allemagne, Egypte, Syrie, Maroc, Chine, Inde et Indonésie).
Forces, faiblesses et perspectives des PAM
La demande sans cesse accrue des PAM pour des usages aromatique et alimentaire, cosmétique (y compris la parfumerie), pharmaceutique et médicinal ainsi que comme composant pour la production de pesticides dans le monde ne peut qu'ouvrir de larges opportunités aux PAM tunisiennes.
La demande mondiale est concentrée dans trois centres commerciaux principaux à savoir l'Allemagne, les Etats unis d'Amérique et Hong Kong.
L'étude indique, à ce titre, que le marché des fines herbes atteindrait les 10,3 millions de tonnes en 2015 contre 9,2 millions de tonnes en 2010 et 7,9 mille tonnes en 2005.
Les huiles essentielles se caractérise, également, par une demande dynamique et à fort potentiel sur le marché international. La demande mondiale en ces produits est estimée à 1,5 milliard de dollars.
Le marché mondial des PAM est estimé à environ 64 milliards de dollars. Les PAM présentent, selon l'étude, de plusieurs points forts à même de leur permettre de conquérir de nouveaux marchés. Il s'agit notamment du savoir-faire dans la distillation, sachant que la Tunisie compte 36 unités de transformation, d'un coût de production compétitif sur les marchés extérieurs et d'une diversité des produits PAM.
Toutefois, la filière souffre de certaines failles, situées particulièrement, au niveau des systèmes d'exploitation qui doivent être révisés, affirme l'étude, dans le cadre d'une stratégie nationale. En outre, la filière ne dispose d'aucune politique des prix, ni de veille technologique, économique et environnementale, en plus de la prédominance des petits agriculteurs et la concentration des exportations sur des marchés qui connaissent une certaine stagnation. "Si ce secteur est promu de la manière la plus efficiente, les importations de la Tunisie en médicaments et cosmétiques seraient réduites, outre l'expansion de la filière vu sa haute valeur ajoutée", selon M.Toukabri. A cet effet, il préconise de mettre les technologies et la recherche à la disposition de la filière, de développer la formation des jeunes dans le domaine des PAM, moyennant l'introduction de modules appropriés à la gestion, la production et l'exploitation, la distillation et la valorisation par le packaging ainsi qu'aux procédures de certification. "Certains textes juridiques concernant le mode d'exploitation du couvert végétal doivent être revus pour préserver les ressources naturelles et la pérennité de l'entreprise, outre le renforcement de l'encadrement des opérateurs", ajoute le responsable. Pour pallier les difficultés et assurer l'essor de la filière PAM, un plan d'action s'étalant sur la période 2014-2018 sera présenté, prochainement, aux différentes parties concernées. Ce plan dont le coût est évalué à environ 60MDt est axé sur "l'amélioration des connaissances spécifiques aux PAM", "le développement de la production des PAM, l'organiqation du secteur", "la promotion de la filère" et la biodiversite et durabilité du secteur PAM".
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