L'État tunisien face à une impasse économique : La pression sur les citoyens honnêtes

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Leith Lakhoua

L'État tunisien traverse une période économique particulièrement difficile, où il semble avoir recours à une stratégie de plus en plus risquée : piocher dans les réserves des citoyens honnêtes. Ce phénomène, qui reflète l'incapacité des autorités à diversifier les sources de revenus et à créer un environnement propice aux investissements, ne présage rien de bon pour l'avenir du pays.

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En premier lieu, ce recours aux citoyens comme solution financière indique une grave carence dans la gestion économique de l'État. Depuis des années, les autorités tunisiennes n'ont pas réussi à mettre en place des mécanismes d'investissement efficaces. Une gestion à court terme et une absence de vision stratégique ont conduit à une stagnation, freinant le développement de l'économie nationale. Alors qu'auparavant des initiatives comme la loi 72 sous le gouvernement de Hédi Nouira ou la création de la Banque Tunisienne de Solidarité (BTS) sous Ben Ali avaient permis de stimuler la croissance, aucune mesure nouvelle n'a vu le jour depuis plus de deux décennies.

Sous Hédi Nouira, la loi 72 de 1972 avait permis la constitution de sociétés bénéficiant de certains avantages fiscaux, un cadre propice à l'essor économique. Cette législation avait dynamisé l'économie tunisienne en favorisant la création d'entreprises et l'emploi. Plus tard, sous le régime de Ben Ali, la BTS avait donné aux jeunes diplômés sans emploi l'opportunité de se lancer dans des projets économiques, tout en contribuant à alimenter les caisses de l'État. Cependant, depuis plus de vingt ans, aucune mesure véritablement innovante n'a vu le jour pour relancer la machine économique tunisienne.

Le récent projet des entreprises citoyennes, lancé par le président Kais Saïed, s'inscrit dans cette tentative de donner un nouveau souffle à l'économie nationale. Cependant, force est de constater que cette initiative n'a pas encore trouvé son véritable essor. Les attentes sont grandes, mais les résultats restent en deçà des espoirs placés en cette réforme.

Dans ce contexte de crise, l'État se tourne donc vers ses citoyens, en particulier ceux qui sont organisés et respectent leurs obligations fiscales, pour remplir les caisses. Cette pression constante sur les classes moyennes et les citoyens honnêtes pourrait cependant s'avérer contre-productive. En cherchant à extraire des ressources là où il n'y en a plus, l'État risque de briser le dernier rempart qui lui permet encore de fonctionner : la confiance des citoyens dans l'intégrité du système. Si cette confiance est érodée, l'État perdra son dernier levier, et l'avenir économique du pays pourrait devenir encore plus incertain.

Il est donc urgent que l'État tunisien repense sa stratégie économique. Plutôt que de se tourner toujours plus vers ses citoyens pour combler ses déficits, il est impératif de favoriser l'innovation, l'investissement et de stimuler la création d'entreprises. L'histoire de l'économie tunisienne a montré que des solutions peuvent émerger de la créativité et de l'engagement des citoyens. Mais sans une vision claire et des mesures concrètes, la Tunisie risque de s'engouffrer dans un cercle vicieux, où les efforts des citoyens honnêtes et organisés ne suffiront plus à maintenir l'équilibre économique.

Ainsi, la situation actuelle ne laisse que peu de place à l'optimisme. À moins que des réformes profondes et innovantes ne soient mises en œuvre, le pays risque de sombrer dans une crise économique prolongée, avec des conséquences dramatiques pour ses citoyens et son avenir.



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